A Garden Enclosed  
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Dans son ouvrage Gan Na'ul, le Jardin Fermé, Abraham ben Samuel Aboulafia évoque l'art du Tserouf, une approche mystique de la permutation des lettres de l'alphabet hébreu. Transcendant les trois procédés de guematria, notariqon et de temourah recommandés par les kabbalistes médiévaux, Aboulafia énonce un système de méditation dont l'objet ne serait plus seulement la Torah mais l'écriture dans son ensemble.

Quelques années après sa mort, à la fin du XIIIe siècle, les disciples du Tserouf rencontrèrent Aristoxène de Tarente, membre influent de la confrérie pythagoricienne d'Apamée en Syrie. Des savoirs hermétiques furent alors échangés entre un maître des Nombres, dont les subtils arrangements permettent à l'initié de comprendre l'harmonie parfaite du monde, et les adeptes d'une longue tradition d'étude combinatoire des textes sacrés hébreux, dans lesquels chaque lettre possède une valeur numérique.

Sans doute se retrouvaient-ils dans la fraîcheur d'un cabinet de travail au sol dallé de motifs géométriques pour de longues discussions passionnées ou décousues. Peut-être même se rejoignaient-ils sur une terrasse, le soir venu, lorsque Al-Zahra qui guide les bergers dans le désert se lève sur l'horizon, pour observer et mesurer la course des étoiles.

De cette assemblée éphémère émergea l'archétype d'une architecture combinatoire. Chaque bâtiment, mais aussi chaque salle, cour, passage et escalier, suivraient l'ordre strict des justes proportions, déclinées selon de savantes itérations mathématiques. Les artifices de perspective dont s'enorgueillissaient les anciens pour abuser l'œil seraient bannis, de même que les ornements qui détournent les sens, car il est écrit que seules la rigueur et l'ascèse permettent d'entendre la musique de l'âme.